Des Larmes de sang
– Tome 1 –
Larmes Noires
Ecrit par Stacy Bailly
Publié en janvier 2013 aux éditions Sharon Kena
158 pages, disponible en e-book !
Aidlinn Weiss, jeune Anglaise de quinze ans, commet l’irréparable : elle partage la couche d’Ewen, son cousin, beau jeune homme et chevalier irlandais qu’elle aime depuis l’enfance, ennemi juré de Bradley, son frère, et perd ainsi sa virginité.
C’est à ce moment que, pour elle, commence l’enfer… Ewen, qui nie tout sentiment à son égard, est condamné à la peine de mort alors qu’elle est envoyée en maison close…
Un an plus tard… Souillée jusqu’au plus profond de son âme et totalement désemparée, Aidlinn envisage le suicide. C’est alors qu’un nouveau client franchit la porte de sa chambre. La silhouette athlétique, un visage d’une beauté divine, des yeux magnifiques… Elle le reconnait tout de suite. Le jeune homme se jette sur elle et, dégainant sa dague, s’apprête à lui trancher la gorge…
Des Larmes de sang : Larmes noires est publié et vendu dans la collection Romance Historique des éditions Sharon Kena, c’est donc confiante en ces choix éditoriaux que j’ai souhaité lire ce livre. La quatrième de couverture est bien écrite et plutôt séduisante : difficile de ne pas souhaiter connaître la suite, je me suis laissée convaincre !
Bien que je n’espérais pas des personnages à la psychologie très développée, ni des sentiments vivaces, pas plus qu’une intrigue originale, j’avais des attentes : j’escomptais des sentiments poignants et une héroïne attachante. Je souhaite insister sur la différenciation des sentiments par rapport à l’attirance physique. Je distingue en effet le désir du corps d’autrui – l’instinct animal, des sentiments que l’on peut éprouver pour l’esprit d’une personne : pour sa personnalité, ses qualités et ses défauts, pour sa manière de s’exprimer et plus sentimentalement, pour son âme. La Nature est prévoyante : sentiments et attirance physique vont bien souvent de pair, on tombe généralement amoureux d’un être que l’on trouve beau et désirable – la laideur, le dégoût, le caractère repoussant voire répugnant d’un être humain n’incite généralement pas l’esprit à l’amour. C’est pourquoi aucun lecteur ne se plaindra d’une héroïne qui tombe éperdument amoureuse d’un garçon vif d’esprit, protecteur, attentionné – et beau garçon, du moins à ses yeux. Cela correspond non seulement au schéma amoureux classique, mais c’est surtout ce que le lecteur attend d’une romance : du rêve, de l’amour et des corps qui fusionnent.
Malheureusement, il est difficile d’imaginer un amour composé uniquement de désir charnel. On peut concevoir qu’un esprit naïf confonde le sentiment amoureux avec l’obsession de possession physique, pourquoi pas. Cependant, il ne faut pas abuser de la crédulité du lecteur : si l’objet du désir devient cruel et agressif, que ce magnifique corps est habité par un être abject et perfide qui le fait souffrir intensément et à de nombreuses reprises, alors sans hésitation l’esprit se libère de toute envie sexuelle. La sécurité, la nécessité de rester en vie prime sur les besoins sexuels, c’est une évidence. C’est pourquoi ce premier tome des Larmes Noires m’a énormément déçue de la première à la dernière ligne : alors qu’il s’agit d’une romance, il n’y est pas question de sentiments, pas une seule fois! Il n’est sujet que de désirs sexuels, d’attractions physiques et de pseudo-sentiments découlant de cet attrait. Alors que l’héroïne, Aidlinn, est de nombreuses fois blessée physiquement et psychiquement par Ewen, elle ne peut s’empêcher de toujours le désirer, de l’aimer parce que, comprenez-vous, il est beau. Trop beau. Divinement beau. Oh, comme ses muscles sont forts et puissants ! Oh, comme son sourire est craquant ! Oh, comme son port de tête est altier ! Oh, oh, oh : ça n’en finit pas ! La totalité du récit est une répétition absurde d’adjectifs qualitatifs formulés par l’esprit subjugué d’Aidlinn. Qu’importe qu’Ewen soit traître, menteur, manipulateur ! Qu’importe qu’il égorge des hommes comme il respire, qu’il manie l’insulte aussi bien que son épée ! L’auteur, Stacy Bailly, présente son héroïne comme une jeune fille candide et douce, qui ne peut croire en la noirceur d’âme d’Ewen. Soyons honnêtes : ce n’est pas de la candeur, c’est de la bêtise. L’histoire n’est absolument pas vraisemblable, et je suis persuadée que ce roman ne pourra plaire qu’à des jeunes gens très peu expérimentés en matière d’amour et de sexualité. Pour des adultes, même de jeunes adultes comme moi, ayant déjà connus la tourmente amoureuse, la violence verbale et parfois physique, ayant déjà ressenti la douleur des choix qui s’imposent d’eux-mêmes quand l’on souffre dans son corps comme dans son esprit, ce récit est totalement inconcevable. Ma lecture fut dominée par l’envie de gifler Aidlinn, tant son comportement est débile et dangereux.
Par ailleurs, l’intrigue est vraiment plate et frustrante, en vérité il ne se passe quasiment rien dans ce roman : on piétine ! Dans les premières pages du récit, Ewen soustrait Aidlinn de la maison close dans laquelle elle est séquestrée pour la mener devant le roi et la faire témoigner. L’histoire est le récit de leur voyage à cheval, depuis la maison close jusqu’à la cour royale : durant ce trajet, quelques rencontres, beaucoup de disputes ainsi que de violence, et surtout une incroyable torture psychologique! Elle l’aime et le désire, mais il est cruel, donc elle ne peut l’aimer, mais le désire toujours, alors il faut le détester, mais oh qu’il est beau, elle le regarde et le désire de nouveau, se déteste, le déteste, ne l’aime plus mais l’aime encore, car si elle ouvre les yeux et le voit, oh qu’il est beau ! Les pensées d’Aidlinn n’évoluent pas au cours du récit, et c’est fort dommage : si seulement ces pensées tortueuses avaient été les prémices d’une maturité nécessaire ! Mais non, elle est violentée, tourmentée, blessée, manipulée encore et encore mais n’a de cesse, pages après pages, de désirer et d’aimer sans aucune raison un homme dont elle ne sait absolument rien, ne percevant que sa terrifiante beauté. Les personnages n’ont aucune épaisseur, leur personnalité est quasiment inexistante, par contre ils sont très facilement imaginables, tant les adjectifs descriptifs de leur physionomie sont nombreux !
Une histoire très décevante donc, et qui dessert une plume pourtant efficace ! En effet, malgré sa jeunesse Stacy Bailly a une écriture très fluide et agréable qui présage de très bons textes. Ainsi, malgré les descriptions incessantes d’Ewen et la profusion d’adjectifs, je n’ai trouvé que très peu de répétitions ! Cela mérite d’être souligné, car les jeunes auteurs utilisant un vocabulaire aussi varié que précis sont rares. De plus, alors que le récit fut ennuyant et les personnages très creux, j’ai ressenti comme une dépendance à l’histoire : je désirais vraiment connaître la suite. Malgré ses très nombreux défauts, le texte parvient donc à se rendre addictif : je ne peux que féliciter la plume de l’auteur, c’est une prouesse ! Je crois qu’il faut parfois prendre patience et attendre qu’un texte gagne en maturité avant de le publier : Larmes Noires est un roman parfois complexe mais que l’on comprend facilement grâce à une jolie écriture, si l’histoire avait été mieux travaillée et les personnages plus approfondis, je pense que le roman aurait été agréable. J’encourage l’auteur à persévérer, son écriture et son imagination ne peuvent que se bonifier avec le temps et l’expérience !
« …elle se surprit à penser que si elle avait été un arbre, Rory aurait été l’hiver. Les arbres se laissaient dévêtir par l’hiver, gémissaient, pleuraient lorsqu’il leur envoyait son souffle glacé, et le gel sont il s’accompagnait finissait souvent par les tuer. »
Pour aller plus loin dans la découverte de cette oeuvre, je vous propose de visiter le site internet créé par Stacy Bailly à propos de son roman, Des Larmes de sang.
Je remercie sincèrement les éditions Sharon Kena pour la confiance dont ils m’honorent.