Les fous de pêche

Les fous de pêche,
écrit par Marc Méret.

Publié en 2007. 



 Quatrième de couverture :

 

« Ceux-là forment une petite équipe de pêcheurs composée d’un noyau dur et de quelques occasionnels qui se joignent à eux pour des parties de pêche au coup, aux carnassiers, à la mer…Nous les retrouvons au fil des pages sur des berges aussi différentes que celles d’un étang, d’une rivière à migrateurs en Picardie ou sur les côtes du Cotentin. Nous les accompagnons dans la brume de l’aube, dans une barque au printemps, dans la bise de l’hiver. Ils manient la grande « gaule » en carbone, les lancers légers ou lourds, la canne à mort manié et surtout … à mouche.L’écriture de Marc Méret a la précision du botaniste pour décrire la nature dans laquelle se fond le pêcheur et l’âme poétique pour nous rappeler que seule l’amitié donne du prix à ces moments de vie. »
 
 

Je m’attendais à un roman original sur l’univers – au final terriblement méconnu – des pêcheurs. J’ai eu mieux, beaucoup mieux que cela. Dix-neuf nouvelles, pas moins. Chacune originale, différente, distrayante et relaxante. Chacune se renouvelant par son ou ses personnages, de nombreux poissons et techniques de pêches, des descriptions terriblement vivantes et authentiques, sa poésie ou son réalisme, ainsi que par des berges jamais identiques. Quelle joie de retrouver dans la poésie de Marc Méret certains paysages familiers, tels que la Picardie ou la Bretagne, mais également de découvrir de nouvelles contrées et de nouvelles rivières.

« Avant de terminer ce qui restait de café dans la thermos, les deux hommes se resservirent, avec une part de camembert au lait cru, une petite larme de ce délicieux Chablis qui avait accompagné leur pause déjeuner. La bouteille déjà à moitié vide, ou encore à moitié pleine selon la manière de voir les choses, rejoignit dans la glacière l’excédent de « jambon cru – pâté de campagne – saucisson » soigneusement enveloppé dans du papier d’alu et le reliquat de salade de « pommes de terre – haricots verts – tomates » qui baignait dans la vinaigrette au fond d’un grand Tupperware. Ils seront bien aise, vers dix-sept ou dix-huit heures, de retrouver ces reliefs bien gardés au frais par la glace de deux bouteilles d’eau minérale extraites à l’aube du congélateur. »

La première nouvelle m’avait laissé assez perplexe : la découverte assez brutale de l’univers complexe de la pêche à la mouche n’avait rien de séduisant. Tout était décrit avec beaucoup de réalisme et de détails, mais je ne trouvais pas la poésie, la beauté des mots que j’attendais. Néanmoins, j’avais aimé ces langages vivants et fraternels : j’ai donc poursuivi ma lecture, et j’ai ainsi pu découvrir une toute autre écriture – bien plus agréable. Comme je le disais précédemment, Marc Méret a su me surprendre en renouvelant son style dans chacune des nouvelles. Sa plume a su m’atteindre aux moments où je m’y attendais le moins, sachant parfois m’émouvoir ou me transporter loin, très loin de mon lit…

« (…)

-Et pis, y viennent nous vouère ! Ah ça…

Il resta un petit moment perdu dans ses pensées de vieux papy gâteau.

-On s’plaint pas, ça va toujours. L’pire c’est m’pauv’femme. Ca y fait quatre-vingt-onze comme mi. Alle voit pus clair. Alle dit qu’alle arrive pus à faire s’n’ouvrage comme y faut, qu’alle est pus bonne à rien. Laisse, que j’dis, j’vas l’faire. D’temps en temps alle laisse un peu brûler l’fricot, alors alle pleure. Mi, j’dis qu’ch’est bon…et pis j’eul minge. »              

« Equipé, la canne de neuf pieds montée, il dévale le talus, abandonne ses soucis professionnels, les ignorants et leurs couillonnades dans la première touffe d’orties qui borde le sentier et, prenant appui sur le poteau de coin, escalade allègrement la clôture en fils de fer barbelés, en prenant garde de ne pas y percer ses cuissardes en néoprène, pour retomber en souplesse dans le pré où serpente la rivière, son amie, sa maîtresse qui l’attend… Vaque-t-il à d’autres occupations ? Elle l’attend… Est-il en retard ? Elle l’attend, sans impatience, sans mauvaise humeur… Elle l’attend au milieu du pré et au coin du bois, avec ses formes arrondies, ses courbes parfaites, ses plats si lisses et d’une grande douceur, ses chutes attrayantes au chant mélodieux, ses profonds mystérieux alimentés par des courants au tempérament de feu, sa chevelure de renoncules et ses tresses de jonc et d’iris qui encadrent des reflets rosis par le soleil couchant. Elle l’attend,  offerte, lascivement étendue dans son lit à baldaquins de peupliers. A la nuit tombée, elle l’enlacera dans la fraîcheur et la brume qui montent de ses flancs et ses remous lui murmureront des mots incompréhensibles, mais si paisibles et si doux qu’ils seront à n’en pas douter des mots de tendresse et d’amitié. »

Le point faible de ces nouvelles réside dans les détails, parfois trop compliqués pour des non-initiés ou débutants, des techniques de pêche : un petit lexique explicatif aurait été le bienvenu. Néanmoins, cela m’a donné l’envie de redécouvrir la pêche, et peut-être était-ce là le but recherché. Pendant environ sept ans, j’ai accompagné mes parents dans leurs innombrables week-ends de pêche, sur les pontons d’un marais. Jusqu’à la lecture du passage ci-dessous, j’avais totalement oublié ces week-ends ; mais l’écriture de Marc Méret est tellement authentique qu’au fur et à mesure des mots, chaque détail – jusqu’à l’odeur de l’amorce – m’est revenu…

« Le pêcheur mouilla d’abord son amorce pour lui laisser le temps de gonfler, planta ses piquets, disposa les rouleaux pour la grande canne à déboîter à sa gauche et trois mètres en arrière, mit la bourriche et l’éponge (un petit truc pour se laver les mains) à l’eau. Comme un rituel, notre homme pratiquait son installation toujours dans le même ordre. Parallèlement à la berge, il déposa son lancer à brochet où le premier gardon pris sera loché à l’aide de l’aiguille sur un avançon de cinquante centimètres en très fins fils d’acier tressés gainés de nylon, l’hameçon double à cheval derrière la tête. Il emboîta ensuite les brins de la longue canne en carbone de dix mètres cinquante, garda les trois plus gros en réserve sur les rouleaux et fixa la ligne de cinq mètres au bout de l’élastique intérieur.

Le couple de cygnes qui élevait sa nichée sur la petite île vint s’assurer que l’intrus ne présentait aucun danger. Le mâle siffla deux fois en tendant son long cou dans la direction du pêcheur, pour la forme. Ils disparurent dans la brume vers leur pâturage au milieu des petits fonds. »

A l’époque, ne plus avoir l’obligation d’accompagner mes parents avait été pour moi une délivrance. Je m’aperçois aujourd’hui – avec beaucoup de plaisir – que j’ai la nostalgie de ces longs après-midis de patience et de techniques.
 

Marc Méret m’a transmis, au travers d’une poésie très douce, un peu de son amour de la pêche ; je l’en remercie.

« Aura-t-il besoin de ces cinq mouches CDC qu’il a montées, amputant d’un bon quart d’heure sa partie de pêche ? Certes, non ! Ses casiers débordent d’une foule de modèles dans les numéros d’hameçons les plus usités. La plupart ne serviront seulement jamais, peut-être un de ces jours funestes où les truites mal lunées refusent tout ce que vous leur passez au-dessus de la tête. Elles sont destinées à ça, ces mouches surnuméraires qui encombrent les boîtes, mais font la fierté de leur propriétaire sous les regards envieux des collègues qui achètent les leurs. Et si par bonheur l’une d’entre elles tente un poisson rebelle, elle est sur l’heure élevée au rang suprême de sauve-bredouille et devient pour deux ou trois saisons la mouche miracle, la mouche dont tout le monde voudrait connaître le montage jalousement gardé secret par son auteur. »

 Je remercie chaleureusement http://flof13.unblog.fr/files/2010/01/livraddictlogosmall.pnget les éditions http://2.bp.blogspot.com/_7QWzZWxCPYg/Syjsz74kGjI/AAAAAAAAAHk/RchJBExDGXI/S1600-R/logo.jpg qui m’ont permis de découvrir ce roman!!

2 comments

  1. wepierre michele says:

    Je suis trés contente que ce livre t’as finalement plu, et que cela ta permis de comprendre les week-ends à la pêche

    j’espère te lire prochainement pour une autre nouvelle

  2. Jennifer says:

    Merci de ton passage !! Si tu as envie que je te file un des livres (quand tu auras enfin terminé Hitchcock :P) n’hésites pas =) !! @ bientôt et gros bisous!

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